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Certification en anglais « financée par l’État » ?

vendredi 7 février 2020, par Pierre

Offrir à tous les étudiants de licence une certification en anglais "financée par l’État", n’est-ce pas une preuve de l’intérêt que porte le gouvernement à une meilleure insertion des étudiants dans la vie professionnelle ?
Mais la gratuité a un coût, d’une part certainement pour les finances publiques, d’autre part probablement pour les étudiants qui n’auront pas réussi le niveau demandé, et plus généralement pour la souveraineté de la France et de l’Union européenne. "Si c’est gratuit, c’est toi le produit".

La loi de finances 2020 prévoit de proposer/imposer aux étudiants de licence un test de certification en anglais :

"Dès la rentrée 2020, près de 38 000 étudiants bénéficieront de cette mesure intégralement financée par le MESRI pour un coût de 3,1 M€. Elle concernera les formations les plus exposées à des besoins de certification (licences langues étrangères et appliquées, DUT communication, licence professionnelle commerce international, etc.)Cette mesure gratuite pour les étudiants concernera à terme plus de 400 000 bénéficiaires ; son déploiement progressif s’étalera sur trois ans et concernera dans un premier temps les étudiants inscrits dans des formations préparant aux métiers liés au commerce extérieur ou ayant une dimension internationale. Elle s’appliquera à l’ensemble des étudiants à la rentrée 2022-2023"

Cette mesure est très contestable :

  • Le coût pour les finances publiques est important : 100 euros par étudiant, pour 400000 "bénéficiaires", cela fait 40 millions d’euros par an
  • La gratuité pour les étudiants n’est pas certaine : d’une part divers tests ne sont valables que deux ans, parce qu’on oublie facilement les détails d’une langue aussi difficile que l’anglais, et d’autre part parce que le gouvernement ne garantit pas que les étudiants malheureux qui n’auront pas obtenu les notes minimales pour la certification pourront repasser le test gratuitement
  • Confier à des structures privées étrangères la délivrance de diplômes est un abandon de prérogatives traditionnelles de l’Etat, c’est un abandon de souveraineté.
  • Faire des certifications uniquement en anglais va provoquer l’abandon de l’étude des autres langues par les étudiants des diverses disciplines, ce qui va entraîner une mauvaise compréhension de l’Europe et du monde.

Ce problème de certification en anglais ne doit pas être réduit à la langue anglaise elle-même. Il s’agit d’un problème de souveraineté et de gouvernance, de gestion des deniers publics, et de droits humains.

Il est bon que les jeunes Français connaissent des langues autres que le français, c’est l’objectif officiel des politiques européennes.

Mais il n’est pas bon que « langues étrangères » soit réduit à « anglais anglo-américain », et il est encore moins bon que l’objectif de l’enseignement des langues ou de la langue soit une certification par un organisme extérieur.

C’est pourquoi nous demandons que la collectivité nationale et/ou européenne prenne en charge l’évaluation des compétences linguistiques.
Avant de généraliser ce qui a été décidé par la loi de finances 2020, et de multiplier par dix le coût pour la collectivité, il faut faire une étude d’impact sérieuse.

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